Le CRBA cultive l'avenir de notre alimentation

Installé au cœur de Charly, dans le territoire de la métropole de Lyon, le Centre de ressources de botanique appliquée (CRBA) cultive une multitude de variétés de légumes, céréales et fruits provenant de la région et du bout du monde. Objectif : identifier les espèces les plus robustes afin de proposer aux agriculteurs locaux des semences capables de supporter le changement climatique.

  • Alimentation
  • Charly

Connaissez-vous la monstrueuse de Lyon ? Rien d’effrayant, il s’agit simplement d’une ancienne variété de tomate qui poussait jusqu’au milieu du 20e siècle sur le territoire métropolitain. De couleur rouge et pouvant peser jusqu’à 400 grammes, elle se rapproche dans sa texture d’un steak de bœuf. Elle n’existe quasiment plus aujourd’hui dans les champs des maraîchers. Sa production vigoureuse et sa robustesse en feraient pourtant une variété adaptée au changement climatique.

« Soixante-quinze pour cent de notre biodiversité cultivée a disparu alors que Lyon était au 19e siècle l’une des premières régions horticoles en Europe », alerte Sabrina Novak, codirectrice du Centre de ressources de botanique appliquée (CRBA). Le résultat de l’uniformisation des variétés de légumes et de fruits engendrée notamment par le développement de l’agro-industrie. « On a donné priorité au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à des variétés modernes, résistantes au transport et au stockage. Cette uniformisation a engendré une perte de diversité génétique des espèces alors que celle-ci rend justement les cultures plus robustes », souligne Victor Durand, chef d’exploitation et codirecteur du CRBA.

Sécheresse, vent et pluie

La monstrueuse de Lyon n’est qu’une parmi les 4 000 graines toutes espèces confondues que conserve précieusement le Centre. Installée sur cinq hectares de terres du domaine Melchior-Philibert à Charly, cette association s’attache à adapter la production de végétaux au changement climatique à travers une méthode unique en France à cette échelle. 

« La mission du CRBA est de sélectionner les meilleures variétés afin que les agriculteurs puissent disposer de semences plus robustes, adaptées aux évolutions climatiques et au territoire », précise Sabrina Novak, qui a cofondé le CRBA en 2008 avec Stéphane Crozat, directeur scientifique. La résistance des espèces aux épisodes de sécheresse prolongée, au vent et aux pluies intenses sont les principaux critères recherchés.

L’anecdote

Peu le savent mais des plantations de coton, d’ananas ou de café ont été essayées sur le territoire lyonnais. « Au 19e siècle, on importait des végétaux et on les acclimatait sur place. D’autres espèces ont eu plus de succès », précise Sabrina Novak, codirectrice du Centre de ressources de botanique appliquée.

Conservatoire à graines

Sur place, la station Vavilov – botaniste russe qui a donné son nom à l’Institut de botanique de Saint-Pétersbourg – est un laboratoire à ciel ouvert où sont cultivées sous cage des dizaines de variétés issues du monde entier. « Nous collectons des végétaux pour étudier la manière dont ils s’adaptent à l’environnement local », explique Victor Durand. 

Après deux expéditions menées au Daghestan (Russie) et dans le Sud-Caucase pour ramener des végétaux, un autre voyage est prévu en 2026 en Arménie. « Nous ciblons des pays à forte amplitude thermique, montagneux et frappés par le bouleversement climatique », appuie la codirectrice, qui évoque aussi les liens importants tissés avec des banques de semences du monde entier.

De ces cages de culture au verger conservatoire de 2,5 hectares, des plantations en tous genres sont étudiées et analysées pour mesurer leurs résistances aux conditions du territoire. Une attention particulière est aussi mise sur les variétés capables de pousser et s’épanouir sans engrais et pesticides. 

Les 4 000 graines sont, elles, gardées précieusement « afin de s’assurer qu’elles ne soient jamais perdues ». Le CRBA dispose à quelques kilomètres de la ferme Melchior, d’une exploitation semencière, propriété de la Métropole de Lyon. Cet espace sert de stockage pour les milliers de variétés de graines conservées en chambre froide et au congélateur, de centre logistique et de lieu de production à plus grande échelle avec un terrain de 1,5 hectare. Cette année, l’équipe a récolté sept tonnes de courgettes bios, qu’elle a ensuite données aux Restos du Cœur, à la Fabuleuse Cantine et à la conserverie Terra douceurs.

Chiffres clés

  • 4 000 variétés de graines différentes

  • 5 hectares cultivés

  • 20 agriculteurs partenaires sur le territoire

Cultiver l’avenir

Cette sauvegarde du patrimoine agricole à long terme se complète avec un autre programme, à plus court terme. Baptisé Cultiver l’avenir, il vise à tester en conditions réelles quatre espèces de légumes (poireaux, radis, courgettes et épinards). « Concrètement, nous disposons de près de 150 variétés de graines pour chaque espèce testée », note Victor Durand.

À raison d’une plantation par saison, l’objectif est de passer de 150 la première année à 30 l’année suivante, puis à une dizaine en troisième année afin de parvenir à retenir les graines les plus adaptées au territoire en 2027. « Nous avons constitué un réseau d’une vingtaine d’agriculteurs avec qui nous travaillons ces expérimentations. Ce sont dix variétés par espèce qui seront distribuées ensuite gratuitement aux agriculteurs acteurs du programme mais également aux maraîchers de notre région », poursuit la codirectrice. 

Le CRBA a pour objectif d’enrichir la biodiversité cultivée et de proposer un large choix d’espèces adaptées aux défis environnementaux actuels. Avec pour ambition de contribuer au renouvellement des produits qui finiront un jour dans nos assiettes.

Des semences locales à la ferme métropolitaine

En bordure des Voies lyonnaises 5 et 11, à quelques pas du tram T5, le long de grands boulevards et à proximité du golf de Chassieu, près de quatre hectares de terre sont cultivés depuis le début de l’année. Ici, tout est bio : potimarrons, butternuts, melons, carottes, tomates, courges, betteraves, pommes de terre, patates douces, choux… 

Cette ferme, exploitée par des agents de la Métropole de Lyon, a pour vocation de fournir une partie des besoins des cantines de 38 collèges du territoire, soit 10 500 repas par jour. Issus des serres de Parilly et du jardin conservatoire de Marcy-l’Étoile, tous les plants sont donc produits en bio pour une récolte de quinze tonnes cette année. « Nous avons choisi de faire au plus simple en prenant des semences issues de structures métropolitaines qui ne travaillent qu’en bio, ainsi que des variétés faciles à conserver », précise Mewan Melguen, responsable d’exploitation agricole pour la Métropole de Lyon.

Cadre de vie

Espaces publics et naturels, aménagement de la ville, déplacements ou encore logement... La Métropole de Lyon agit pour construire et préserver un cadre de vie agréable pour ses habitants.
Dernière mise à jour le 8 octobre 2025

Sur le même sujet

Haut de page